Examen n°3
ISMENE
Il est plus fort que nous, Antigone. Il est le roi. Et ils pensent tous comme lui dans la ville. Ils sont des
milliers et des milliers autour de nous, grouillant dans toutes les rues de Thèbes.
ANTIGONE
Je ne t'écoute pas.
ISMENE
Ils nous hueront. Ils nous prendront avec leurs mille bras, leurs mille visages et leur unique regard. Ils
nous cracheront à la figure. Et il faudra avancer dans leur haine sur la charrette avec leur odeur et leurs
rires jusqu'au supplice. Et là, il y aura les gardes avec leurs têtes d'imbéciles, congestionnés sur leurs
cols raides, leurs grosses mains lavées, leur regard de bœuf -qu'on sent qu'on pourra toujours crier,
essayer de leur faire comprendre, qu'ils vont comme des nègres et qu'ils feront tout ce qu'on leur a dit
scrupuleusement, sans savoir si c'est bien ou mal... Et souffrir ? Il faudra souffrir, sentir que la douleur
monte, qu'elle est arrivée au point où l'on ne peut plus la supporter ; qu'il faudrait qu'elle s'arrête, mais
qu'elle continue pourtant et monte encore, comme une voix aigüe... Oh ! je ne peux pas, je ne peux pas...
ANTIGONE
Comme tu as bien tout pensé !
ISMENE
Toute la nuit. Pas toi ?
ANTIGONE
Si, bien sûr.
ISMENE
Moi, tu sais, je ne suis pas très courageuse.
ANTIGONE, doucement.
Moi non plus. Mais qu'est-ce que cela fait ?
Il y a un silence, Ismène demande soudain :
ISMENE
Tu n'as donc pas envie de vivre, toi ?
ANTIGONE, murmure.
Pas envie de vivre... (Et plus doucement encore, si c'est possible.) Qui se levait la première, le matin,
rien que pour sentir l'air froid sur sa peau nue ? Qui se couchait la dernière, seulement quand elle n'en
pouvait plus de fatigue, pour vivre encore un peu plus la nuit ? Qui pleurait déjà toute petite, en pensant
qu'il y avait tant de petites bêtes, tant de brins d'herbe dans le pré et qu'on ne pouvait pas tous les prendre
?
ISMENE, a un élan soudain vers elle
Ma petite sœur...
ANTIGONE, se redresse et crie.
Ah, non ! Laisse-moi ! Ne me caresse pas ! Ne nous mettons pas à pleurnicher ensemble, maintenant.
Tu as bien réfléchi, tu dis ? Tu penses que toute la ville hurlante contre toi, tu penses que la douleur et
la peur de mourir c'est assez ?
ISMENE, baisse la tête.
Oui
ANTIGONE
Sers-toi de ces prétextes.
ISMENE, se jette contre elle.
Antigone ! Je t'en supplie ! C'est bon pour les hommes de croire aux idées et de mourir pour elles. Toi,
tu es une fille.
ANTIGONE, les dents serrées.
Une fille, oui. Ai-je assez pleuré d'être une fille !
ISMENE
Ton bonheur est là devant toi et tu n'as qu'à le prendre. Tu es fiancée, tu es jeune, tu es belle...
ANTIGONE, sourdement.
Non, je ne suis pas belle.
ISMENE
Pas belle le comme nous, mais autrement.
ÉTUDE DE TEXTE : (10 POINTS)
1. Recopiez et complétez le tableau suivant : (1 pt)
Titre de l'œuvre : …………………………….
-Auteur : …………………………….
-Genre : …………………………….
-Siècle : …………………………….
2. En tenant compte de ce qui s’est passé avant ce passage, dites si les affirmations suivantes sont vraies
ou fausses : (1 pt)
a) Créon a essayé une dernière fois de convaincre Antigone
b) Antigone a déjà enterré le corps de Polynice
c) La nourrice a surpris Antigone qui rentrait discrètement chez elle
d) Ismène sait déjà qu’Antigone a enterré le corps de Polynice
3. De quoi Ismène cherche-t-elle à convaincre Antigone ? (1 pt)
Ismène cherche à convaincre Antigone de ne pas enterrer Polynice.
4. Relevez deux arguments utilisés par Ismène. (1 pt)
5. Comment trouvez-vous Antigone dans ce passage ?
a) Elle est ouverte au dialogue.
b) Elle est hésitante.
c) Elle est obstinée, plus décidée.
Recopiez la bonne réponse. Justifiez-la. (0,5 pt x 2)
6. Relevez dans le texte quatre mots appartenant au champ lexical des sentiments. (1 pt)
7. « ISMENE, se jette contre elle. »
Qu’est-ce qui justifie l’emploie de cette didascalie ? (1 pt)
8. « Il est plus fort que nous ». La figure de style employée dans cette phrase est-elle :
a) Une comparaison ?
b) Une métaphore ?
c) Une hyperbole ?
Recopie la bonne réponse (1 pt)
9. Antigone dit : « Je ne suis pas belle. » Pour vous, qu’est-ce qu’être beau (être belle) ? Justifiez votre
réponse. (1 pt)
10. Pour Ismène, une fille ne meurt pas pour ses idées. Êtes-vous du même avis ? Justifiez votre réponse.(1pt)
Correction de l’examen n°3
ÉTUDE DE TEXTE : (10 POINTS)
1. Titre de l'œuvre : Antigone
Auteur : Jean Anouilh
Genre : Tragédie moderne
Siècle : XXème siècle
2.
a) Créon a essayé une dernière fois de convaincre Antigone : Fausse.
b) Antigone a déjà enterré le corps de Polynice : Vraie
c) La nourrice a surpris Antigone qui rentrait discrètement chez elle : Vraie
d) Ismène sait déjà qu’Antigone a enterré le corps de Polynice : Fausse.
3.
Ismène cherche à convaincre Antigone de ne pas enterrer Polynice.
4.
« Il est plus fort que nous. » « Il est le roi. » « Ils pensent tous comme lui dans la ville. » « Je ne suis pas
courageuse ».
5.
Elle est obstinée, plus décidée. Justification : « Je ne t'écoute pas. » « ANTIGONE, se redresse et crie.
» « Sers-toi de ces prétextes. » « Ah, non ! Laisse-moi ! Ne me caresse pas ! »
6.
Haine, douleur, souffrir, sentir, supplice …
7.
Ismène comprend que ses arguments n'ont pas pu convaincre Antigone.
8.
Une comparaison.
9.
Exemple : Pour moi, être beau c’est se sentir bien dans sa peau et laisser sa personnalité s’épanouir.
10.
Exemple : Je suis contre cet argument sexiste puisque la femme est l’égal de l’homme avec ses propres
convictions.